Back In Black
« Forget the hearse ‘cause I never die,
I got nine lives, cat’s eyes,
Abusin’ every one of them and running wild
‘Cause I’m back.»
AC/DC – Back In Black - Bonefire
Comme je vous l’ai surement déjà raconté une bonne centaine de fois au minimum, l’Eure et Loir, c’est aussi plat qu’une petite fille de 5 ans. En s’éloignant vers l’ouest, on se retrouve dans ce qu’on appel le Perche. Un peu comme la Beauce ou la Sologne, c’est difficilement séparable par des frontières, disons qu’on retrouve le perche depuis le nord-ouest de l’Eure et Loir jusqu’à l’entrée de la « Normandie », dans l’Orne. Qu’est ce qu’on s’en fout ? Oui, vous avez raison, on s’en fout en fait. Disons que c’est le chemin le plus « direct » qui mène à la Bretagne depuis Chartres.
Cette route que j’ai fréquenté un bon nombre de fois lors de mes jeunes années, qui m’amène invariablement vers la ville que j’aime, vers les meilleurs souvenirs de mes années étudiantes. J’ai hâte de la reprendre ce jour, partir de Chartres, passé par Nogent-Le-Rotrou, Le Mans, Laval, puis Rennes, voir les vallées et les collines prendre vie au fur et à mesure des kilomètres avalés. Laissé derrière moi cette terre si plate de la région Centre, qu’on la croirait presque sortis d’un épisode de Fallout.
Il est 15h30, et je viens de finir mon plein d’essence, 3h de route, et c’est partis. Dans la voiture, le minimum de survie : Mon sac de voyage est dans le coffre, il ne se trouve ici que de l’eau, des gâteaux secs et des CDs, beaucoup de CDs. Je n’avais plus qu’à attendre avant de démarrer, je m’allume une clope, la dernière avant un bon moment (j’ai horreur de fumer dans ma bagnole sur une autoroute !!), mon quartier est calme, essentiellement composé de retraité, ce n’est pas la tranche d’âge la plus bruyante, et souvent l’après-midi, ce quartier est plongé dans un calme qui n’est troubler que par le bruissement des feuilles d’arbres et le chant des oiseaux.
Mais c’est le bruit du bus que je remarque, le bruit du bus qui vient de déposer ses passagers. Comme peu de personnes prennent leurs bus à cet arrêt là, j’avais une vague idée de l’identité du passager qui venait de franchir ces portes battantes. Instinctivement, je fermais ma voiture et me dirigeait vers l’arrêt en question. Comme pour confirmer ce que je savais déjà, je reconnu de loin cette silhouette qui leva un bras amical en ma direction lorsqu’elle m’aperçue également. Et voilà ! J’aurais du avoir envie de m’énerver pour les 35 minutes de retard … non, pas possible … putain mais qu’est ce que j’ai moi ?
« Désolé pour le retard, j’ai raté mon bus.
- Ce n’est pas grave Rapha, laisse tombé, on est en vacance, enfin en week-end pour toi, on n’est pas pressé.
- Du coup j’ai oublié de te demandé hier mais, tu dors chez un pote à toi ?
- Non, je ne connais plus que Fleur sur Rennes même, Nath est rentré à Laval, Colin est à Paris, quand à Fleur, elle est marié, à des gosses, je n’ai pas envie de déranger. J’avais réservé une piaule au B&B de Cesson.
- Merde … Ecoute, j’essaierais de me trouver une toile de tente et j’irais au camping, comme au bon vieux temps, au pire tu peux faire un détour par le Décathlon que j’prenne une 2minutes là ?
- Non mais t’inquiètes pas, après ton appel hier, j’ai appelé l’hôtel, voir s’il pouvait me réserver une chambre avec 2 lits simple, et me bloquer 2 chambres simple, je leur ai dit que je les rappellerais pour leur confirmer l’une des deux résa dès que j’aurais ta réponse pour qu’ils ne soient pas pénalisé ce soir.
- Mais tu ne peux pas faire ça dans les hôtels !
- J’y travaillé dans ce B&B là ! Ils me connaissent, ne t’inquiète pas, par contre, il me faut ta réponse avant 16h.
- C’est combien la chambre simple ?
- 42€ la nuit hors petit déjeuner, 6€ de plus par personne.
- Et la chambre avec 2 lits simple ?
- 55€ la nuit.
- Ah ouais ! Donc si on se fait 2 nuits dans la chambre à 55€, on divise les frais par 2.
- T’as tout compris. Moi je m’en fiche, mon budget est déjà prévu, c’est à toi de me dire.
- Non, prends les 2 chambres simples. Avec petit déj’ s’il te plait.
- Ca marche mademoiselle. »
Et nous voilà partis, après un rapide coup de fil à des anciens collègues à moi, direction la Bretagne, putain que j’ai hâte de le revoir ce panneau qui indique « Degemer Mat »… Avant cela, petit arrêt par le Leclerc.
« J’ai un dernier truc à prendre avant de partir»
Lorsqu’elle me vit revenir avec un pack de 30 Leffe, je lis directement l’interrogation sur son visage.
« Mais qu’est ce tu fous avec un pack ? Tu bois en conduisant toi maintenant ?
- Mais non, c’est pour ce soir et demain.
- Comment ça ? »
Je rangeais le pack dans mon sac et fit claquer le coffre de la voiture.
« Monte, on aura bien le temps de discuter en roulant »
Cette fois c’était partis, je partais en vacance avec mon ex, au même endroit qu’il y a quelques années en arrière, des vacances de merde, pourris par des disputes qui ne cessait de nous brouiller, de nous faire nous déchirer, pour aboutir à son départ définitif avec l’autre enfoiré. Mais pas cette fois, j’avais eu Inès au téléphone ce matin pour lui raconter l’histoire. Comme moi, elle voyait une bonne occasion de la récupérer. A moi de ne pas jouer au con, et de poser les bonnes questions. Parce que la Rapha, pour mentir à son mec, c’est qu’il doit y avoir un truc qui cloche.
« Bon, tu m’expliques pour les binouzes ?
- Qu’est ce tu veux savoir ?
- Pourquoi tu les as prises ici ? On pouvait très bien les prendre la bas non ?
- Alors, je te connaissais pas encore mais j’étais veilleur de nuit dans cet hôtel avant, j’y ai gardé de bon souvenir et je connais quasiment tout le personnel en place, ce qui fait que j’y ai encore quelques avantages. Pas tant au niveau des tarifs, ça, ils ne peuvent pas faire grand-chose, en revanche, il me colle toujours dans la piaule la plus proche de celle du directeur.
- Il dit qu’il voit pas l’rapport.
- Bah en fait, Rennes n’est pas une ville réputé pour la sobriété de ses habitants, du coup, un arrêté municipal stipule que la vente d’alcool est interdite en ville après 20h. Avec les pauses, je pense qu’on sera la bas vers 19h30 – 20h. Au niveau de la vue, ce n’est pas forcément le coin le plus glamour de Rennes, c’est un peu une zone industrielle la bas. Et en fait, l’avantage que j’ai, c’est que le patron me laisse toujours un p’tit frigo dans s’te piaule, ce qui fait que je peux y entreposer un stock de binouze que je n’arriverais pas à trouver dans la ville en pleine soirée. J’ai mis le pack dans un sac isotherme dans mon sac de voyage, comme ça pas de soucis à l’accueil, et en rentrant de soirée, on pourra la continué dans nos chambres avec de quoi se désaltérer.
- D’accord … Pas mal ton plan ! Donc si j’ai bien compris, on prend la bagnole jusqu’au centre ville ou on boit dans les bars, puis on rentre à l’hôtel pour ce finir c’est bien ça ?
- Sauf qu’on ne prend pas la bagnole pour aller en ville, c’est en sortie de Rennes, y’a un bus direct qui fait St-Michel à Cesson.
- Presque parfait ton plan.
- Je sais, merci.
- Il manque plus qu’une chambre fumeur, mais ça n’existe plus ça.
- Quand tu connais le patron, ça existe encore. » Lui dis-je, tournant ma tête vers elle avec un large sourire.
Je la vis me sourire en retour et commencer à légèrement rire.
« Y manquerais plus qu’il fasse beau tiens !
- Avec quelques bières et sauc’ dans la tronche, le temps on s’en foutra va ! Et puis je te rappel qu’en Bretagne, il ne pleut que sur les cons, ces même cons qui disent qu’en Bretagne, ils voient le soleil plusieurs fois par jour au moins. »
Cette fois c’était bon, elle avait explosé de rire. J’adorais la voir comme ça, dans cette état, juste heureuse. Elle était comme toujours, radieuse, un petit pull fin noir sculpté parfaitement sa silhouette, son jean serré avec une paire de converse, ses cheveux noirs, mi-long, détaché, tombé sur sa nuque… Qu’est-ce qu’elle est belle ! J’en viendrais presque à pardonner Yohan, quand tu as une telle femme en face de toi, je ne vois pas comment tu peux lui résister, rester insensible a son charme naturel. Oui, naturel car, comme à son habitude, elle n’était pas maquillé. Cette fille passait presque moins de temps que moi dans la salle de bain et elle rayonnais plus que l’astre solaire à l’Aurore.
Je ne pus m’empêcher de sourire, d’un air tout attendrie, à la regarder être simplement heureuse, retrouver encore un peu plus la complicité que j’ai pu avoir avec elle. Mes yeux revinrent à la route, je la laissai choisir un CD, et, surement en souvenir de nos dernières vacances, c’est « Des Visages, Des Figures », de Noir Désir qui fut choisis pour nous accompagné. Je crois que mon visage s’est décomposé lorsque j’ai entendu les premières notes de l’album.
« Ca va pas ? » Me dit-elle.
« Sisi, t’inquiètes, c’est juste que …
- C’est juste que quoi ?
- C’est cet album là qu’on avait mis lorsqu’on avait passé quelques jours en Bretagne la dernière fois.
- Ca te dérange ?
- Non, ça fait bizarre c’est tout.
- T’as une sacrée bonne mémoire pour te rappeler de détail pareil n’empêche.
- Tu t’en souviens de ces vacances ?
- Oui, pourquoi ? Tu ne va pas me dire que tu les as oubliés ?
- Non, mais je préférerais.
- No comment.
- Pas besoin d’en reparler, ça fait assez longtemps maintenant, j’ai tourné la page. Je dois même te dire que ça me fait extrêmement plaisir que tu viennes avec moi mais, je peux te poser une question ?
- Dis toujours.
- Tu as dis quoi à Yohan ? Il sait que tu pars en week-end avec moi ?
- Il travaille ce week-end, et j’ai prétexté un séminaire avec le taf dans un coin paumé de basse-normandie ou on a l’habitude d’aller avec la boite, et ou je capte jamais, pour être tranquille.
- Je te déconseille donc facebook durant le week-end.
- Il n’a toujours pas facebook, et moi je n’ai toujours pas de smartphone.
- Effectivement, ça règle une partie du problème. Et lui dire la vérité ?
- Bien sur, t’en as d’autres des comme ça ? Tu te vois dire à ta meuf que tu te barre en week-end avec ton ex ?
- Bah j’te dirais que je suis célibataire donc j’ai pas trop ce problème, je fais ce que je veux, mais effectivement, ça doit être moyen. »
On a longuement discuté sur le trajet, Cantat hurlait sa rage dans le micro, les guitares jouaient leurs dépression, le mixe des deux est assez impressionnant, et c’est ce qui a fait de Noir Désir ce groupe si mythique pour les fans de Rock. J’essayais de ne pas trop parler du passé avec Rapha, mais qu’est ce que c’est compliqué ! Après plusieurs années avec une fille, d’avoir l’impression de revenir en arrière, d’avoir déjà vécu ce moment, sauf que vous avez vieilli, vous avez eu une vie, des souvenirs, ou plus encore, avec d’autres entre-temps. Sentiment bizarre qu’on était bien ensemble et qu’on aurait du se donner du temps, une chance, faire des efforts peut être ? Alors qu’à l’époque, on n’en avait plus l’envie, on se disait qu’il était mieux de tout détruire, pour mieux repartir.
Il est 18h, nous arrivons près de Laval et nous nous posons 5 minutes sur une aire de repos afin de prendre un café avant d’entamé la dernière partie du voyage. Assis sur une de ces tables en bois, nous admirons le paysage. Plus que quelques heures avant de me retrouver dans ma Bretagne tant chéri. J’ai les yeux dans le vague, je suis juste heureux de revenir dans ce secteur que j’aime tant. C’est bien le seul avantage d’être remonté dans le coin, je ne suis plus qu’à 3h de Rennes, alors qu’avant je devais traverser la France. Lorsque je vivais dans le Rhône, je ressentais des fois ce fameux spleen qu’on peut ressentir lorsqu’on est loin de chez soi, loin de ses racines. Ma Bretagne, elle me manque, me rapprocher de la, même si c’est dans une région que je déteste, me permet de me soulager de ce manque.
« Cyril ? T’es avec moi ?
- Hein ?
- Tu ne m’écoutais pas là ?
- Euh … non, pas là, non, désolé, j’étais perdu dans mes pensées.
- J’te demandais, tu sais ou on peut manger ce soir ?
- J’sais pas, un grec, un mac do, un douich, je n’ai pas réfléchis à la question je t’avoue.
- Tu ne m’as jamais emmené manger les galettes-saucisses avec lesquels tu me cassais les couilles quand tu ressortais des matchs, avec cette ambiance dont tu me parlais dans le bus qui ramener les supporters dans le centre, ou tout le monde buvait son chouchen avec sa galette saucisse.
- Tu te sens de supporter un match entier pour goûter a ce privilège ?
- Ca coûte combien une place ?
- Ca me coutais 8€ derrière les buts à l’époque, ça doit pas couter beaucoup plus cher maintenant, on ne peut pas dire que Rennes soit devenu une place forte du foot Français.
- Ok, bah écoute, j’veux bien supporter 1h30 de péquenots qui coure derrière une baballe et qui gagne des millions si ça fait partis du folklore local.
- Ola ! Tout doux ma belle ! Mettez pas la charrue avant les bœufs, j’vais déjà voir si y’a un match demain… » Je me lançais donc sur mon Samsoule à la recherche de la journée de demain. Et coup d’chance, un joli match de L1 se profilait … Paris – Marseille ! … Sinon c’était Rennes – Troyes au Stade de la Route de Lorient… Les 2 équipes sont sauvés, n’ont plus rien à jouer à 3 journées de la fin, mouais, ce n’est pas le top mais si ça la tente …
« Y’a Rennes – Troyes demain, ça va pas être le match du siècle, ça risque d’être pas très beau à voir, mais ça sera toujours mieux qu’un Chartres – Limoges.
- Je me doute … Pour 8€ toujours ?
- Ouais, selon le site du club ça n’a pas changé derrière les cages.
- Si ça nous gonfle on se casse avant la fin ?
- Si tu veux, j’suis pas supporter rennais moi !
- Ok, bah pourquoi pas.
- Ca marche, on passera récupérer les places demain.
- Cool ! Ca va être sympa, puis on va au Barantic après ?
- Tu te rappel même du nom du bar ?
- J’avais adoré cette ville quand tu m’y as emmené la première fois, et le Barantic et La Cité d’Ys sont deux supers rades. »
Oh j’étais en train de fondre littéralement ! Elle savait s’y prendre pour me flatter ! Elle aussi, avait une bonne mémoire.
« Bon alors, tant qu’on parle de foot, que je te prévienne, sur le retour, dimanche midi, on est attendu à Ancenis manger chez des potes à moi.
- C’est ou Ancenis ?
- Un peu au nord de Nantes, sur la route qui mène à Angers. C’est un petit bled.
- T’as des potes qui se sont installé là-bas ?
- Un collègue, qui est devenu un ami, et ancienne star du FC Nantes, Reynald, entraineur d’un club de la région d’Orléans, est invité pour le week-end chez d’autres footeux nantais, que je connais aussi. Ca va être un repas assez particulier pour moi.
- Je risque de me faire chier.
- Tu sais, on ne parle pas que de foot dans la vie.
- De toute manière, maintenant que je suis là, je n’ai plus le choix. Y’aura qui ? Des fois qu’il y ait des noms que je connaisse.
- Reynald Pedros, Serge Le Dizet, Frédéric Da Rocha, Nicolas Savinaud et Mickaël Landreau, et nous donc.
- Le dernier que tu cites me dit quelque chose.
- Un de mes joueurs préféré ce type, il aurait du y avoir Christian Karembeu aussi, mais il a été retenu en Angleterre pour raison professionnel.
- Et tu connais tout ce monde là toi ?
- Surtout Reynald, les autres, j’ai du les rencontrer une fois à un cocktail organisé par le FC Nantes après un match qu’on avait fait la bas avec Chartres, enfin contre l’équipe réserve de Nantes hein. On a bien sympathisé avec Reynald, on a passé la soirée ensemble, et on est resté en contact, d’autant qu’Orléans, ce n’est pas très loin.
- Ok, on ne s’y attarde pas trop quand même ?
- Il rentre pour quelle heure Yohan de toute façon ?
- Pas avant 22h.
- On essaie d’être rentré pour 20h maximum.
- Ok… Ca va être un bon week-end.
- Rapha, je peux te poser une question ?
- Euh … oui, dis toujours.
- Voilà, j’ai … j’ai l’impression qu’entre toi et Yohan, ça va pas spécialement fort en ce moment, je me trompe ? »
Elle m’a fusillé d’un regard noir, s’est levé, et est retourné s’adosser à la bagnole pour fumer sa clope. Je me suis levé pour la rejoindre.
« Excuse moi, je n’aurais pas du te poser cette question, c’était indiscret et …
- Ta gueule ! Putain, mais qu’est ce que ça peut te foutre ? T’es ma mère ? Ca te regardes pas comment ça va dans mon couple ! C’est fini entre nous maintenant ! Et il va falloir t’y faire !
- J’ai compris, désolé, viens, on y retourne. »
Toujours énervé, elle écrasa sa clope au sol, et remonta dans la voiture. La fin du voyage fut glaciale, et nous avons fait l’heure de route restante sans décrocher un mot. Je la connaissais suffisamment pour savoir qu’il fallait mieux que je la ferme, et que je la laisse se détendre avant qu’elle ne revienne vers moi. Encore une fois, niveau tact, on a fait mieux, on a fait beaucoup mieux même, mais ça n’a jamais été mon fort la diplomatie, encore une fois, ça se confirme. On t’avait jamais dis de fermer ta putain de gueule Cyril ?
A notre arrivé a Rennes, ça va déjà un peu mieux, elle est plus détendu, et j’ai eu la bonne idée de ne pas revenir sur le sujet (oui parce que faire 2 fois la même gaffe en une heure de temps, ça aurait quand même été gros !). Je retrouve ma pote Julie à l’accueil qui nous file les codes de nos chambres respectives, en m’adressant un énorme clin d’œil qui … n’a pas manqué d’échapper à l’œil aiguisé féminin de Rapha ! On se donne rendez-vous dans la chambre de l’un ou de l’autre, dès qu’on a finis de ce posé, je voulais mettre les bières au frais, ça prends un peu plus de temps.
Alors une chambre de B&B, c’est toutes les mêmes. Un grand lit 2 places dans 12m² environ, une petite table près de l’unique fenêtre afin de pouvoir se poser, écrire, ou mettre un ordinateur, déposer les pubs, etc … Et 2m² de salle de bain afin une douche, un chiotte, et un lavabo. Comme prévue, je retrouve ma chambre habituelle, ce petit frigo gracieusement mis à dispo par Antoine, le directeur, comme à chaque fois que je viens dans le secteur. Je souris, heureux de retrouver ce coin dont l’air me réussi tant !
Je posais mon sac et déposai mon ordinateur sur la table (on sait jamais, des fois que j’ai besoin de bosser …) et commençait à sortir les bières pour les entreposer lorsqu’on frappe à ma porte.
« 271049 ! » Criais-je à l’attention de mon visiteur presque surprise.
« Tu devrais gueuler ton code encore plus fort, tout l’hôtel ne l’a pas encore entendu.
- Oui mais il n’y a que nous deux dans l’hôtel ma chère Raphaëlle.
- Ca fait bizarre de t’entendre m’appeler comme ça !
- Ca donne un côté solennel.
- Solennel mon cul oui !
- Quelle grosse voix !
- T’es con … ah au fait, tu te l’ai tapé la réceptionniste ? »
J’en ai lâché ma bière ! Rattrapée juste à temps pour être enfourné au frigo.
« Bah on peut dire qu’elle est direct ta question !
- Oh ça va hein ! On ne se connaissait pas quand tu vivais ici, tu peux m’répondre.
- De toute manière, au pire des cas, on sort plus ensemble hein ! Non je ne me la suis pas tapé, elle n’était pas célibataire à l’époque. Mais qu’est ce qui te fait dire ça ?
- Son clin d’œil qu’elle ta fait en arrivant. Enfin tu sais, y’en a qui sont pas jalouse. »
Alors là, j’ai bien eu envie de lui refoutre dans la gueule un petit
« Oui, j’ai remarqué, je suis sortis avec toi », mais je me suis dis qu’il serait bon que je ferme ma gueule cette fois.
« Surement, n’empêche qu’on est pas sortis ensemble.
- Je ne te parle pas de sortir avec elle.
- Pardon, je ne suis pas sortis avec elle, je n’ai pas couché avec elle non plus, et d’une manière général, je n’ai couché ni avec Julie, ni avec Latifa et Manon qui sont les 3 employées de sexe féminin dans cet hôtel, bon, bien sur, je ne parle pas de Margot qui est la femme du boss, il était encore moins question que je tente quoi que ce soit. Et d’une manière générale, je ne couche pas avec mes collègues, très chère !
- Ah ouais ? Et Florence quand tu bossais à Chartres ? Peu de temps après qu’on ce soit quitté ? »
J’ai encore eu envie de lui sortir
« Et toi ? Yohan alors qu’on était toujours ensemble ? » Mais encore une fois, mon bon sens m’a conseillé de fermer ma gueule.
« Hum … On va dire Joker la dessus, bon, euh … pour changer de sujet, J’te propose une crêperie sur la Place St Anne, et ensuite un Troll Farceur ?
- Ouais tu ne veux pas répondre quoi !
- Ouais t’as pas encore faim quoi ? »
Elle éclata de rire avant de me prendre par le bras pour me sortir de la chambre, direction le bus, et ce bar un peu particulier du vieux Rennes. J’adore les vieilles villes, surtout le côté architectural des maisons, la version moyenâgeuse, mais plutôt du nord de la France, avec les pierres, les colombages, tout ce que j’aime. J’ai plus de mal avec le vieux Lyon, au demeurant très jolie, je le trouve trop inspiré de l’Italie, avec les crépis jaune pâle, rose pâle, ce n’est pas que c’est moche, c’est juste pas ce que je préfère… Rennes, c’est tout ce que j’aime en terme d’architecture, en terme de population, de joie de vivre, de climat, tout ça me semble inexplicable, je n’arrive pas à y mettre des mots. Juste un ressenti merveilleux, une sensation de bien-être incroyable. Aujourd’hui j’arpentais de nouveaux ces rues pavés, je croisais de nouveaux les punks à chien qui ne me semblait pas avoir bougé depuis les années ou je vivais ici. Je retrouvais tout ce que j’aimais, j’étais là, avec mon ex, avec la personne que j’aime, je dois bien me rendre à l’évidence maintenant, je suis juste heureux, et je souhaite au plus profond de moi, que cette journée ne se termine jamais.
Nous avons passé une super soirée, on a dégusté la gastronomie local, une bonne grosse crêpe salée au blé noir, accompagné de chouchen en apéro, de cidre pour le repas, on a retrouver les potes au Troll Farceur, grand bar sombre, ambiance jeu de rôle médiéval-fantastique, soirée passé à l’hypocrace, à la bière et au chouchen. Soirée mémorable ou le temps semble ce figé, ou tout passe trop vite, l’heure comme les tournées. On s’amuse, on rigole, raconte des souvenirs du bon vieux temps. Puis on voit l’heure, elle nous explose en pleine figure, nous rappelant que traverser toute l’agglomération à pied, au vu de notre taux d’alcoolémie actuel, ce n’est pas forcément une très bonne idée. On a laissé Colin et Nath nous offrir notre soirée, promettant de payer notre tournée le lendemain, et on a couru jusqu’à la place St-Anne pour récupérer le dernier bus nous ramenant à Cesson.
Comme dans un film, on est rentré dans le bus au tout dernier moment, essoufflé. Haletant, nous prenons nos tickets auprès du chauffeur, l’esprit encore embrumé par l’alcool et les dernières conneries racontés par les potes, et nous nous laissons lourdement tomber sur 2 sièges libres. Les bus nocturnes ont toujours cette capacités d’être habité presque exclusivement de zombie, on peut lire sur leur visage leur soirée arrosé, profitant de ce voyage seul, loin de l’excitation de la nuit pour faire le point, se calmer, et se décomposé sous l’effet de l’alcool. Inconnus se rendant à un after, rentrant se coucher, ruminant une soirée ratée ou un rendez-vous mémorable. Les bus nocturnes ont toujours cette merveilleuses capacités à ramener tout le monde sur terre, à mélangé les humeurs et les sens pour nous rappeler à notre vie réelle. Mélange de joie et de tristesse, de mélancolie et de dépression. Les bus de nuit font rêver ou cauchemarder.
Inconsciemment, nous observions ces 3 personnes silencieuses, presque gêner de se retrouver avec d’autres, de devoir partager leur carrosse d’un soir avec d’autres inconnus. L’adrénaline d’une superbe soirée ainsi que de la course au carrosse était retombé pour nous, et la fatigue reprenait le dessus. Nous ne nous sommes pas échangés un mot, observant les gens, la route, le ciel et les étoiles de cette belle nuit de la fin du mois de mai. Nous ne sommes pas encore en été, les valses des touristes n’avaient pas encore commencé. Nos regards ce sont croisé, des sourires se sont échangés. Es-tu fatigué ? Non, je prendrais bien encore une bière. Pas de soucis, tu sais ou les trouver.
Après un voyage qui nous semble interminable, nous arrivons à bon port, et nous retrouvons dans ma chambre pour finir tranquillement la soirée en dégustant quelques bières supplémentaires. Cigarette, bière, alcool et nourriture grasse, le régime parfait pour tout sportif qui se respecte. Affalé sur le lit prêté par l’hôtel, le cendrier entre nous deux, la fenêtre légèrement ouverte, on zappe pour essayer de trouver un programme plus ou moins intéressant, à même d’achever de nous faire passer le reste de la nuit. Rien, comme d’habitude, rien d’intéressant. Finalement, après moult négociation, c’est la grosse cinquantaine d’épisodes de Kaamelott sur le disque dur de mon PC qui fera l’affaire. On se calme, on discute, on rigole devant les conneries de la bande a Astier. Mais il est difficile d’avoir ce genre de soirée avec son ex, sans revenir sur le passé, sans se rappeler tout ces moments qu’on a passé ensemble, ces instants de complicité qui nous semblait perdus lors de la rupture, mais que, lorsqu’ils sont retrouvés, nous font toujours douté, et nous demander ce qui s’est passé dans nos têtes pour en arriver là. Au fil du temps qui passe, des épisodes et répliques cultes qui défilent, les langues se délient, l’alcool faisant son œuvre, chacun deviens moins timide, n’hésitant plus à se confier à celui avec qui nous avons lié nos vies pendant plusieurs années. C’est Rapha qui ouvrit le livre des souvenirs.
« Du coup j’avais raison, la musique, tu n’as pas continué.
- Au contraire, j’ai eu une belle carrière musicale, même si je n’ai jamais pu en vivre et lâcher mon travail, je n’ai que le regret de n’avoir pu continuer.
- Comment ça ?
- A Lyon j’ai monté Lugh, mon projet, on a sortis 1 album, ils font actuellement le second. J’ai joué avec Sanctuaire, ou j’ai découvert les concerts en Suisse, en Grèce et au Danemark, et enfin, avec Wedingoth, j’ai sortis 2 albums et tourné en Belgique, Luxembourg, Allemagne, Pologne et République Tchèque. Bien sur, la France était à chaque fois incluse dans le lot. J’ai souvent espérer te voir dans le public quand nous jouions à Paris. Ca ne s’est jamais produit.
- En effet, on n’était pas au courant que tu continuer la musique.
- Nico vous en avez jamais parlé ?
- T’es devenu un sujet presque tabou après ton départ. On évitait de parler de toi devant Yohan, ça le mettait en colère et il tapait presque systématiquement une de ses crises de schyzophrénie.
- Ouais, je vois l’idée, et … il en fait plus maintenant ?
- Non, c’est comme s’il ne lui était jamais rien arriver. »
Je n’ai pu m’empêcher d’afficher un rictus narquois lorsque j’ai entendu cette phrase. Ce qui, bizarrement, ne lui a pas beaucoup plus.
« Je vois pas ce qu’il y a de drôle ! Tu sais qu’il ne les contrôle pas !
- Il n’est pas malade, si tous les psys du monde ne lui ont jamais rien trouvé, c’est qu’il n’a rien, et qu’il se sert de cette stratégie pour se rendre intéressant lorsqu’il se rend compte qu’il n’est plus le centre de l’attention ! Voyons Rapha, tu vis avec depuis assez longtemps pour t’en être rendu compte ! T’as jamais trouvé ça bizarre qu’il n’en fasse plus depuis que j’ai quitté Chartres ? Et qu’il n’en fait quasiment qu’à l’évocation de mon nom ? Avant c’était des qu’il était un peu péter dans une soirée et que plus personne ne faisait attention à lui.
- Ecoute, on passe une bonne soirée, on va éviter de parler des sujets qui fâche.
- Je suis bien d’accord avec toi. Donc voilà, je n’ai pas arrêté la musique après avoir quitté Chartres, contrairement à ce que vous avez cru. J’ai encore toutes les photos promos et interview que j’ai pu donner.
- Alors pourquoi t’as pas continué ?
- Je me suis brisé l’épaule il y a 3 ans maintenant. Une épaule gelée, je ne pouvais plus jouer pendant 2 mois. Un an après, je me suis refait la même, j’ai perdu un peu de mobilité au bras gauche, et le kiné m’a dis qu’après 9 mois de rééducation, il ne pouvait rien faire de plus et si je continuais à jouer, je finirais paralysé. J’ai donc rendu mon matos, mes contrats…
- Tes contrats ?
- J’étais sponsorisé Velvet Cymbals, Pro Orca, Sonor et Evans, autant te dire que le matos me coûtait plus très cher à la fin.
- Ah ouais quand même !
- Et donc voilà, j’ai arrêté, à regret, mais si je risquais de perdre un bras, j’aurais du arrêter en tout les cas, et je préfère arrêter avec mes deux bras plutôt qu’avec un en moins.
- D’accord … Et pourquoi le foot ? T’as jamais joué au foot !
- J’ai fait du basket et du foot quand j’étais gosse, mais je n’ai jamais été très doué dans les 2 sports et je suis vite passé sur le banc déjà quand j’étais à Chartres. Quand on s’est connu, je revenais de Rennes, j’étais en transit entre Rennes, Blois et Evry, du coup je ne suis pas allé me proposer aux clubs du coin pour entrainer leurs équipes de jeunes comme j’en ai eu l’habitude. Arrivé à Lyon, j’ai repris les benjamins du club de mon quartier, puis les minimes, les seniors, j’ai passé mes diplômes, et fait mon stage auprès de l’Olympique Lyonnais afin de finaliser mon diplôme d’entraineur professionnel. Ca m’intéressais, j’ai voulu allez au plus loin possible, mais je ne pensais pas être un jour entraineur d’une équipe première.
- Et t’es revenu à Chartres du coup ?
- En fait, l’entraineur en place depuis des années à quitter le club, Gérard, le président, s’est donc mis en quête d’un nouvel entraineur. Au vu des moyens du club, il ne pouvait pas prendre un entraineur expérimenté et il cherchait sur la liste de ceux qui ont nouvellement eu le diplôme. J’étais dans cette liste, et j’avais joué au FC Chartres étant gamin, du coup, il m’a rappelé.
- T’étais pas bien à Lyon ?
- J’y ai toujours une bonne partie de mes amis, j’y ai vécu pas mal d’années, connait pas mal de monde aussi, mais j’avais plus la musique, et ça me pesait un peu sur le moral d’aller voir les groupes avec qui je jouais il y a encore 6 mois en concert alors que moi j’étais dans le public. Ma boite avait fait faillite et je me suis retrouvé licencié économique. Alors quand Gérard m’a appeler, j’ai vu ça comme un signe du destin, me réorienté, avoir la chance de vivre de ma passion, et s’il fallait revenir aux sources pour ça, alors ça en valais la peine à mon sens.
- La par contre, on a été surpris quand on a vu ta photo en une de l’écho.
- Je veux bien te croire. »
Vous connaissez ces moments de blancs ? Ceux ou l’on sent que quelqu’un a quelque chose à dire mais qu’il n’ose pas ? Ces blancs qui semblent durer des heures alors qu’en réalité seul quelques secondes suffisent ? Bah voilà ce qui arrive en ce moment. On est resté là, allumant des clopes, buvant des bières et regardant Kaamelott, j’étais intimement persuadé qu’on avait envie de revenir sur la nuit ou nous nous sommes mis ensemble, c’était le même genre de situation … juste avec un lit deux places au lieu d’un lit une place. Mais par peur ou pudeur je pense, personne n’osait parler. Nous nous sommes regarder, nous avons souris, oui, aucun doute, nous étions redevenu ami et peut être …
Yohan à écrit :
Encore un long chemin à parcourir, 4h30 de TGV entre Marseille et Lille, arrêt par Paris, je déteste cette ville, je déteste cet endroit et les grandes villes en général, je les déteste peut être même plus que je ne déteste ce type qui tente encore une fois de récupérer ma copine. Ce petit salopard qui m’est toujours passé devant, ce petit con qui ne vois jamais rien venir, tellement simple de le manipulé, alors que j’ai de la culture et que je ne suis pas un imbécile, toujours il m’est passé devant.
Tiens, encore un pigeon qui viens de se manger le pare-brise du train, encore une vie animale détruite par la connerie humaine !
Ah ça, pour inventer et détruire notre environnement on est fort, mais personne pour penser au bien-être, à croire que nous ne sommes rien d’autres que des futurs tas de cendres, ici sur terre, juste bon à engraisser des porcs infâmes et sans moral, se vautrant dans la luxure et le pêché le plus total, sans respect pour son créateur, pathétique créature païenne, sans remord ni reconnaissance, juste prêt à fourrer leurs putes au plus profond de leur être, les engrossés et créer une horreur encore pire que le modèle de base. Plus personne de philanthrope, je déteste la race humaine, j’ai honte d’en faire partie. Je n’ai jamais demandé à naître, je n’ai jamais voulu vivre, et à chaque solstice d’hiver, la fête de ma naissance me rappel à quel point je souhaite mourir et détruire. Car rien ne mérite d’être ici, rien ne mérite que nous détruisions la nature, Apulée doit se rebeller pourtant ! Pourquoi laisserait-elle faire tout cela si elle n’avait pas un plan derrière la tête ? Elle ne peut pas tolérer de telles souffrances faîte à son peuple. Elle me parlera prochainement, me guidera vers sa volonté.
La seule chose qui me retiens ici, et la certitude que je retrouverais Brocéliande, et que je ne serais pas seul. Cette fille est le cadeau d'Apulée pour me remercier de mon travail envers elle, la seule créature humaine qui mérite d’être sauvé, la seule qui n’est pas inconsciente de ce qui se passe autour d’elle. Oh bien sur, Patrick, Antoine et Arnaud sont de bons amis, mais ne sont pas digne d’être sauver.
J’ai mis le pilote automatique, c’est tout droite, j’observe le paysage massacré par l’homme, je peux entendre la souffrance de la terre lorsqu’elle est souillé par une quelconque inventions humaine. Mon Dieu qu’elle me manque ! J’ai hâte de me retrouver dans ses bras, j’ai hâte de la chérir à nouveau. Je l’aime, elle me comprends, elle me calme et m’apaise. Depuis que je l’ai récupérer, après tant de nuit à l’imaginer salis par Cyril, je vais mieux, il ne dort plus à mes côté, cette créature masqué que je visualise si bien depuis mes 6 ans, qui ne m’a jamais parler, qui se contente de m’observer, inlassablement, à chaque fois que Morphée s’empare de mon esprit, de mon âme et de mon cœur. Elle me disait qu’ il n’est que mon imagination, je ne le crois pas, je sais qu’il existe, et qu’il a une mission à me confier, mais je n’en suis pas encore digne à l’heure actuelle. Elle est tout pour moi, je ne pourrais pas trouver la force de continuer mon combat si elle n’est plus à mes côté.